Dune de Denis Villeneuve : le retour du roi ?

 

 

Dune est, pour moi, le film le plus attendu de l'année. Ce constat bien évidemment très subjectif repose sur le fait qu'il s'agisse d'un des seuls vrais films de science-fiction ayant le potentiel d'être un chef-d'oeuvre. Sur le papier, tous les éléments sont réunis : un matériau de base à la notoriété incontestable, un réalisateur qui a déjà fait ses preuves dans son art et un casting de rêve. 

Pour tout cinéphile, Dune porte le lourd fardeau de devoir sauver une période compliquée pour le cinéma à grand spectacle, souffrant de la pandémie de COVID comme de la concurrence des plateformes de streaming, et sans cesse grignotée par la toute puissance de Disney et des films de super-héros. Le blockbuster est-il condamné à être accessible à toute la famille et à s'intégrer dans un univers étendu toujours plus sérialisé ? Je ne l'espère pas.

C'est chargé de ces lourdes espérances que Dune s'est présente à moi. J'ai lu le livre de Frank Herbert comme j'ai vu la précédente adaptation de David Lynch. Je ne suis pas un fanatique inconditionnel de l'oeuvre originelle, n'ayant jamais été convaincu par le manichéisme du premier tome et le déterminisme du destin de Paul Atréides. Cependant, je sais reconnaître la cohérence de son univers, la portée à la fois économique et spirituelle de l'épice, et la puissance visuelle de son imaginaire. Tout amateur de science-fiction a ancré quelque part au fond de lui les grandes étendues désertiques d'Arrakis, la terreur sourde des vers des sables et les silhouettes fantomatiques des Fremen aux yeux bleuis par l'épice, ne serait-ce qu'à travers les oeuvres qui ont été influencées par Dune, comme Star Wars.

Fidèle au matériau d'origine, le Dune de Denis Villeneuve l'est assurément. Loin des errances baroques du film de David Lynch,  la mise en scène du Canadien est précise, clinique, élégante. L'architecture monolithique des palais et des vaisseaux est écrasante, froide, dans la lignée minimaliste de ses précédents films. Le travail sur la lumière naturelle est méticuleux, la visualisation de l'épice est subtile à travers des scintillations flottant dans l'air de façon erratique et insaisissable, les trémulations du sable à l'approche d'un ver sont terrifiantes, la musique de Hans Zimmer appuie le côté vertigineux de l'univers. Mais loyal, Denis Villeneuve l'est peut-être trop. Toute adaptation a-t-elle vocation à illustrer de façon méthodique et révérencieuse l'oeuvre originelle ? Bien sûr, la moindre infidélité se serait vue lyncher par les fans de la première heure, mais ici, qu'apporte le film de 2021 au récit de Frank Herbert ? En quoi Denis Villeneuve se l'est-il approprié pour le rendre plus pertinent dans l'époque actuelle ? Moi, il ne m'a presque jamais surpris et c'est bien dommage.



Muturscore : 7.5/10. "Je reconnaîtrais à Dune les mêmes qualités et défauts à ceux que je trouvais à Blade Runner 2049, du même réalisateur. Si je salue la mise en scène impeccable, une grandiloquence jamais ridicule et un sens de l'atmosphère digne des plus grands, cela ne me fait que plus regretter le petit supplément d'âme et de singularité qui ferait la différence entre la très bonne adaptation et le chef-d'oeuvre marquant durablement l'imagination. Peut-être en demandais-je trop, mais j'irai tout de même voir la suite avec grand plaisir."

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