Star Wars : Les Derniers Jedi de Rian Johnson

Attention ! Cette critique comporte des spoilers !

Synopsis : L'intrigue de l'épisode VIII prend la suite immédiate du Réveil de la Force. Malgré la victoire contre la base Starkiller, les forces rebelles sont impitoyablement pourchassées par les légions du Premier Ordre. La jeune Rey tente de se former auprès du maître Jedi Luke Skywalker tandis que Finn et Poe Dameron luttent sans relâche pour la survie des rebelles.

L'avis de Mutur :

Depuis le rachat de LucasArts par l'empire Disney il y a trois ans, chaque mois de décembre est marqué par la sortie d'un nouveau film Star Wars.
Alors, le film de Rian Johnson représente-t-il une publicité de luxe destinée à inonder les magasins de jouets de produits dérivés, ou parvient-il à exister en tant qu'objet cinématographique à part entière ?

Le principal reproche que je faisais au Réveil de la Force était de faire un plagiat honteux de la structure narrative de l'épisode IV. Si la prélogie de George Lucas était loin d'être parfaite, elle avait au moins le mérite d'être très différente de la première trilogie, d'aborder des thèmes propres à elle et de nous faire prendre conscience de l'immensité et de la diversité de l'univers Star Wars. De plus, le fil rouge de l'histoire représenté par le passage au côté obscur d'Anakin Skywalker donnait un côté tragique, presque shakespearien, ce qui est assez osé pour des blockbusters.

Points forts :
- L'aspect visuel et les effets spéciaux. La photographie est superbe. Certaines trouvailles visuelles sont particulièrement réussies ( le vaisseau de Snoke sectionné en deux lors d'une séquence silencieuse et onirique ; la planète de sel rouge dans le dernier acte )
- Un jeu d'acteurs solide du côté de Mark Hamill et Daisy Ridley.
- La backstory de Kylo Ren qui permet d'enrichir enfin le personnage.
- La musique de l'éternel John Williams.
- Des touches humoristiques parfois décalées ( on peut citer par exemple le fer à repasser qui est filmé en contre-plongée comme un vaisseau qui atterrit ).

Points faibles :
- L'un des plus gros défauts de la nouvelle trilogie Star Wars réside selon moi dans ses méchants. Adam Driver est un excellent acteur mais n'a pas vraiment la "gueule" d'un seigneur Sith.

• L'écriture du personnage de Kylo Ren cherche à en faire un personnage torturé et en proie à des conflits intérieurs, ce qui échoue à le rendre intimidant lorsqu'il devient l'antagoniste principal dans la seconde partie du film. 
• Le suprême leader Snoke semble aussi surpuissant que Palpatine, mais se fait tuer de manière ridicule et décevante. 
• Les accès de colère et de frustration du général Hux - joué par un Domhnall Gleeson trop jeune pour être crédible dans le rôle d'un officier supérieur - servent probablement à donner de l'humour à l'histoire mais le font plus passer pour un boutonneux en pleine crise d'adolescence. 
• Et enfin, Gwendoline Christie fait toujours figure de figurant dans son rôle de Captain Phasma, officier d'élite qui se fait pourtant battre aisément par un vulgaire troufion comme Finn.
• On est loin de la classe de Darth Maul ou du charisme de Palpatine.

- Une structure narrative encore trop proche de celle de "L'Empire contre-attaque" : les rebelles sont mis en déroute au début du film, et pris en chasse par l'Empire pendant que le personnage principal s'initie aux arts Jedi avec un vieux maître vivant en ermite sur une planète isolée.
- Une sous-intrigue impliquant les deux personnages les moins charismatiques ( Finn et Rose ) peu intéressante. Avec un Benicio Del Toro ( le meilleur acteur du groupe ) sous utilisé.
- Des batailles spatiales un peu vides, auxquelles il manque un souffle épique. On est loin ici du sublime chaos de la scène d'introduction de l'épisode III.
- Un contexte politique galactique insuffisamment développé. On rejoint ici les critiques que j'avais faites sur l'épisode VII, qui était en incohérence totale avec la fin du Retour du Jedi : Les rebelles ont remporté la victoire contre l'Empire avec la mort de Palpatine. Mais vingt ans plus tard, les méchants sont toujours aussi puissants et la résistance doit continuer à se cacher, comme si les événements importants dans l'histoire de l'univers n'avaient aucune conséquence.
- La faute de conjugaison dans la traduction française du texte déroulant au début du film, incompréhensible à ce niveau.

Le muturscore : 7/10. "Plus réussi que Le Réveil de la Force, Les Derniers Jedi reste néanmoins miné par les défauts inhérents aux personnages et au contexte introduits dans l'épisode VII."

L'avis de Gibbonsking :

J'ai un avis partagé sur le film, il y a du bon comme du mauvais.
Le majestueux et le sublime côtoient le ridicule et l'inutile dans ce film, à tel point que cela en devient frustrant.

Les bons côtés:  
-Visuellement, ça décoiffe, les FX sont aux top, la photographie reprend un peu du gigantisme de Rogue One et nous livre des plans spatiaux de toute beauté (mention spéciale pour la vitesse lumière kamikaze qui nous scie littéralement). le dernier acte est magnifique, avec un affrontement du blanc et du rouge symbolique qui donne un rendu très impressionnant, rien à dire là dessus ( c'est autre chose que les environnements fades de l'épisode VII ).
- La construction narrative des personnages notamment Kylo Ren et Luke Skywalker, qui sont très bien interprétés et exploités. On regrettera cependant le manque de personnalité de Rey.
- La mort inattendue de Snoke, bien que posant des problèmes scénaristiques pour l'épisode IX est un parti pris osé qui nous prend totalement par surprise. En cela c'est innovant et donc très bon, ça illustre parfaitement un des messages du film "les vieilles choses doivent mourir", comme le dit d'ailleurs Kylo Ren. La prise de risque dans Star Wars est suffisamment rare pour être saluée.

Cotés négatifs : 
- Le scénario :

• Premièrement: la gestion de la temporalité est catastrophique dans le film. Le fait que le film commence quelques jours après le précédent et que le film entier se déroule sur quelques heures le réduit au rang de péripétie, comme un épisode d'une série télé. Cela estompe effroyablement ses enjeux !
• Deuxièmement : Le remplissage du film avec les péripéties de Finn , Poe Dameron et Rose qui sont au mieux inutiles, au pire énervantes de futilité. D'autant plus que toutes ces péripéties ne sont causées que par un manque de communication entre Poe et le générale Holdo et se solde par un échec ! Inutile du début à la fin ( un peu comme le personnage incarné par Benicio del Toro. Un peu comme si par manque de communication entre Abrams et Johnson, le réalisateur ne savait pas quoi faire des personnages crées par son prédécesseur, (et la caution asiatique exigée par les chinois de Disney pour draguer le marché national.) et donc se contente de les faire tourner en rond en se gardant bien de quelque développement que ce soit (à part pour Poe qui en a quand même un peu).

Bref, j'aurais aimé voir le même film sans la partie allant de la trentième minute à la première heure et demi du film. Sans être mauvais, le film reste frustrant.

Gibbon score : 6.5/10

Discussion :

Mutur : Perso, le principe qu'il y ait des perso asiatiques dans les star wars ne me gêne pas ( en tout cas c'est moins maladroit que la relecture polyethnique de la mythologie Spiderman ). C'est seulement que le personnage de Rose est aussi charismatique qu'une boîte à chaussures ( sa soeur dont on aperçoit le sacrifice pendant une minute au début du film a plus d'impact sur l'histoire ) et n'évolue pas vraiment. Le personnage de guerrier aveugle joué par Donnie Yen dans Rogue One était beaucoup plus badass et avait toute sa place dans la mythologie sw.

On dirait que les réalisateurs sont pris en tenaille entre leur envie de parler de personnages un peu plus ordinaires dans l'univers star wars ( le stormtrooper qui déserte, la technicienne de maintenance ) et l'obligation de rester centré sur la thématique des Jedi, de la Force et de la famille Skywalker, ce qui aboutit à un grand écart un peu absurde.

Gibbonsking : L’origine de l’actrice n’est pas le problème, bien sûr que on kiffe tous Donnie. Mais cela explique qu’on a rajouté ce personnage inutile pour des mauvaises raisons. Donc en plus de ne rien apporter, elle ajoute de la confusion parce qu’il y a déjà trop de personnages ! Luke, Leia, Rey, Finn, Poe, Rose, Chewbacca, BB8, R2, snoke, Hux, Ben solo, Holdo, Bénicio del toro, phasma, c’est le bordel.

Mutur :  Ce qui est triste ( et inquiétant ), c'est le formatage des blockbusters lorsqu'ils arrivent sous le giron Disney. Les nouveaux Star Wars ne sont en aucun cas des mauvais films ( comme les Marvel ), mais il y a une forme de standardisation de la narration, et d'installation de l'inconséquence au mépris de toute forme de cohérence. Avec le rachat de la Fox par Disney, j'ai peur que ça ne se généralise encore à l'avenir.

Je me fais un peu l'avocat du diable en tant que défenseur de la prélogie ( tant celle-ci est aujourd'hui la foudre des critiques ), mais au moins George Lucas ( malgré tous ses défauts en tant que scénariste ) avait une vision d'ensemble des choses, et il a su faire grandir son univers et la rendre plus mature et plus sombre. Avec la prélogie, il a mis en place un contexte cohérent, avec ses systèmes politiques et ses luttes internes, dans lequel évoluent ses personnages. La prélogie a agrandi son univers, la nouvelle trilogie au contraire la rétrécit ( avec des rebelles qui ne sont plus qu'une poignée et rentrent tous dans le millenium falcon alors que c'était une faction qui s'étendait dans toute la galaxie, et un Empire qui se résume à trois malheureux croiseurs ). Le côté épique de Star Wars venait de la richesse de son univers, et c'est quelque chose qui se perd petit à petit je trouve.

Gibbonsking : Je suis d’accord avec toi, et je défendrai toujours la prélogie !

Notamment l’épisode III qui reste mon préféré de tous.