Disney est-il invincible ?



L’année 2019 est celle de l’offensive de masse de la firme aux grandes oreilles, avec le climax de la phase 4 du Marvel Cinematic Universe (Captain Marvel qui a franchi le millard de dollars, Avengers Endgame qui est bien parti pour battre des records), 4 remakes d’anciens succès (Dumbo, Aladdin, Le Roi Lion, Maléfique 2), la fin de la troisième trilogie Star Wars, et des suites de dessins animés à succès (Toy Story 4, Reine des Neiges 2), comme si Walt Disney Pictures cherchait à donner le coup d’estoc pour achever ses concurrents chancelants.
Les années 2010 ont vu s’affirmer la domination sur le box-office mondial de la firme aux grandes oreilles, avec l’avènement de la poule aux œufs d’or qu’est le Marvel Cinematic Universe, puis le rachat de la franchise Star Wars, et depuis quelques années, le filon (que d’aucuns qualifieront de paresseux) que sont les remakes des dessins-animés à succès (la Belle et la Bete, le livre de la jungle…).
En 2016, Disney a réalisé le grand-chelem en plaçant 5 films dans le top 5 mondial du box-office. C’est un exploit que la Major compte bien reproduire en 2019. Au-delà des simples chiffres du box-office, la firme semble vouloir se placer dans une situation de monopole sur le divertissement de masse, avec l’industrialisation des franchises qui viennent écraser une concurrence qui tarde à s’organiser pour faire face (DCEU, monsterverse, dark universe). De manière implacable, c’est le même schéma commercial qui est répété :
-          Etablir un point d’ancrage avec un premier film à succès (Iron Man, le Réveil de la Force)
-          Faire des sorties à des rythmes répétés (annuel ou pluri-annuel) pour ne pas laisser le temps au spectateur de se reporter sur d’autres franchises.
-          Déverser des produits dérivés sur tous les médias disponibles (séries TV, jouets)

A l’avenir, le portefeuille de Disney va encore se renforcer avec le rachat de la Fox, lui ouvrant les droits des X-men qui viendront se raccrocher au MCU, ainsi que les franchises estampillées James Cameron (saga Avatar et peut-être qui sait, les suites d’Alita Battle Angel)
S’il faut indubitablement reconnaître le succès commercial de la firme, certains critiques pointent le risque d’une certaine uniformisation du divertissement grand public, avec de moins en moins de prises de risque et de franchises nouvelles pour les spectateurs.

Nous tenterons de répondre ici à la question suivante : qui peut menacer l’hégémonie de Disney sur le divertissement de grand public pour les dix prochaines années (et plus ?), et s’établir définitivement comme le patron de l’imaginaire collectif d’une génération entière de bambins émerveillés et influençables ?


Les autres majors

Warner Bros 

La franchise Lego s’est rapidement essoufflée. Le DC Extended Universe a retrouvé des couleurs avec Aquaman et Wonder Woman mais manque encore de cohérence et de vision à long terme (encore un Joker, encore un nouveau Batman ?). Harry Potter et les Animaux Fantastiques attirent de moins en moins les foules. L’avenir du MonsterVerse reste incertain (Godzilla, King Kong), car on ignore si les films de monstre peuvent redevenir une vraie tendance ou rester un marché de niche cantonné au plaisir coupable.
Warner place ses espoirs dans la franchise Pokemon qui est très ancrée dans l’imaginaire collectif, et continue à persévérer dans la SF adulte (les films de Christopher Nolan restent des valeurs sûres sur le plan critique et commercial, tout comme on attend le prochain Dune de Denis Villeneuve malgré l’échec de Blade Runner 2049).

Universal 

Peut-être le plus gros concurrent de Disney, Universal dispose de plusieurs franchises poids lourds dont le succès n’a fait que se renforcer avec les années. On peut citer Jurassic World, James Bond, Fast and Furious, ou les Minions. Cependant, on voit mal Fast and Furious continuer indéfiniment sa course dans le kitsch et le second-degré, Jurassic World peine à élargir son horizon, et chaque épisode de James Bond voit sa production tourmentée par les retards et les changements de réalisateurs.

Columbia (Sony)

Le géant japonais continue de capitaliser sur sa seule vraie franchise à succès : à savoir l’homme-araignée. Spiderman, La Major va tenter de se relancer avec Jumanji ou Men in Black mais les projets semblent moins clairs que chez ses concurrents.

Lionsgate

LionsGate peine à revenir au premier plan depuis les succès des franchises Twilight et Hunger Games. Les films Playmobil et Hellboy sauront-ils redresser la tendance ?

Paramount

Encore plus que chez les autres Majors, on retrouve des franchises vieillissantes telles que Terminator ou Mission Impossible, dont le succès ne repose que sur la notoriété de ses stars (Tom Cruise, Arnold Schwarzenegger) mais ne parviennent pas à étendre leur univers et à introduire de nouveaux personnages marquants. On voit également une tentative de se tourner vers la jeunesse avec les films Dora l’exploratrice ou Bob l’éponge mais l’engouement public semble plus que modeste pour l’instant.


Les nouveaux acteurs 

Amazon

Doté de fonds quasiment illimités, le géant du commerce en ligne s’est lancée avec fracas dans le divertissement avec sa plateforme Amazon Studios. La série TV à venir dans l’univers du seigneur des anneaux a fait grand bruit avec son budget pharaonique de 500 millions de dollars. Permettra-t-elle à Amazon de se faire une place dans l’univers du divertissement ?

Netflix 

Présent chez 140 millions de foyers, responsable de millions d’heures de sommeil et de travail perdues, le géant du streaming déverse une quantité impressionnante de contenu (films et séries TV sur sa plateforme), quitte à s’endetter massivement (plus de 20 milliards de dollars de dettes) pour continuer à étoffer son offre et attirer davantage de specatateurs. Ce fonctionnement est-il viable à long terme ? Netflix saura-t-il faire face à la montée des plateformes de streaming des autres Géants (Amazon, Disney) ? Rien n’est moins sûr. On verra notamment ce que donnera la série The Witcher avec Henry Cavill qui a déjà fait couler beaucoup d’encre.

Les productions chinoises 

Les films chinois montent au box-office, avec pour preuve le carton de Wandering Earth (700 millions de dollars) en 2019. Si les Chinois ont de plus en plus de moyens financiers, le réseau de distribution internationale reste archi-dominé par les majors d’Hollywood, condamnant pour l’instant les productions de l’Empire du Milieu à rester cantonnées dans le pays. Cependant, la distribution web (Netflix) commence à être une voie alternative pour les productions asiatiques.

Disney lui-même

La stratégie de Disney ne tient que grâce au rythme effréné des sorties. Pour continuer à captiver ses spectateurs, Disney doit maintenir une certaine qualité dans ses productions et attirer toujours plus de talents. Une paresse dans la production ou l’écriture, une lassitude et une saturation du public et le système entier peut se gripper. On peut citer les récents faux-pas que sont Solo ou un Raccourci dans le temps. Pas de quoi remettre en cause la rentabilité du système ni le planning des sorties futures, mais un signe avant-coureur d’essoufflement ?

L’univers du divertissement grand-public est en mouvement constant, tout comme les modes de consommation du public, et personne ne peut se reposer sur ses acquis, y compris un géant comme Disney qui sera forcé de s’adapter aux modifications futures du marché (plateformes de VOD etc).



Commentaires